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Originaire du Lot-et-Garonne, Pierre-Etienne Daniel Campagne naquit le 10 juillet 1850. Monté à Paris pour y intégrer l'École des Beaux-Arts, c'est dans l'atelier d'Alexandre Falguière qu'il fait ses classes.
Il exposa pour la première fois au salon des Artistes français de 1889. Il produit avec bonheur des sculptures allégoriques, des portraits ou des scènes de genre.
Il mourut à l'aube de la Grande Guerre, en 1914.
Dans le Paris de la Belle époque, le public, avide de spectacles, partage son admiration entre Sarah Bernhardt, dont le style grandiloquant s’adapte à merveille au répertoire dramatique où elle excelle, et Réjane1, à la gouaille et l’accent tout faubourien, qui pétille dans les comédies de boulevard.
En cette soirée du 27 octobre 1893, le théâtre du Vaudeville fait salle comble. Dans les coulisses, les 48 acteurs qui, dans quelques instants se succèderont sur scène se concentrent. Dans sa loge, la grande Réjane respire calmement, sentant la pression monter. Ce soir, c’est la Première de Madame Sans-Gêne, la nouvelle comédie d’Émile Moreau et de Victorien Sardou.
Quand deux heures plus tard le rideau de velours rouge tombe sur la scène du théâtre du Vaudeville, les applaudissements explosent. Le rideau se relève. Les artistes reviennent saluer. Lorsque Réjane reparait sur scène, la salle se lève d’un même mouvement. Sous les bravos et les sifflets, Réjane et toute la troupe salue. Victorien Sardou est appelé sur scène. Le Rideau retombe, puis remonte face à l’instance du public. Madame Sans-Gêne est un succès. Il y en aura plus de mille représentations.
Mais qui est donc cette Madame Sans-Gêne qui remporte un tel succès ?
Une blanchisseuse, qui épouse un soldat de Napoléon, et le suit, comme vivandière sur tous les champs de bataille, jusqu’à ce que, distingué, son cher époux finisse général, puis maréchal et duc de Dantzig. Madame Sans-Gêne, c’est Catherine Hubscher2, l’épouse du maréchal Lefebvre, personnage historique dont Emile Moreau et Victorien Sardou se sont servis pour créer un personnage à la hauteur du talent de Réjane.
Cependant, Catherine Hubscher, si elle a réellement existé, n’a jamais hérité du surnom de « madame Sans-Gêne ». Ce surnom avait été celui de Thérèse Figueur, l’une des rares femmes soldats de l’armée de Napoléon. Fille de la Révolution, elle s’est imposée dans ce milieu extrêmement masculin, autant par son courage et sa bravoure, que par sa faconde et son langage sans détour qui lui valurent ce surnom de sans-gêne. Toutefois, ce surnom s’appliquait si bien à Catherine Hubscher, que Victorien Sardou et son acolyte ne se sont pas privé de le détourné à son profit, et Thérèse Figueur, la vraie « madame Sans-gêne » s’est enfoncée un peu plus dans l’oubli, tandis que la Maréchale de Dantzig en tirait une gloire posthume et inespérée !
L’intrigue, bien sûr, n’a rien d’historique et tient tout de la comédie de boulevard.
Catherine Hubscher est une blanchisseuse réputée pour son franc-parler, dans le Paris de 1792. Elle est fiancée au sergent Lefebvre. Alors que se déroulent de sanglantes émeutes autour de la prise des Tuileries, Catherine Hubscher sauve la vie d’un jeune noble autrichien, le Comte de Neipperg.
Quinze ans plus tard, Lefebvre est devenu maréchal et duc de Dantzig. Il a épousé sa blanchisseuse, qui devenue duchesse de Dantzig. Ils reçoivent leur ami Neipperg, mais celui-ci se prépare à l’exil pour avoir entretenu une liaison avec une femme mariée, avant d’accueillir chez eux les sœurs de l’Empereur. Au cours de la réception, la maréchale, face à l’attitude hautaine des sœurs impériales, revendique haut et fort ses origines populaires. L’affaire vient aux oreilles de l’Empereur qui demande à Lefebvre de divorcer. Celui-ci refuse et la maréchale est convoquée à son tour. Celle-ci raconte à l’Empereur sa carrière de vivandière dans l’armée, lors des nombreuses campagnes menées par l’Empereur, et lui rappelle même qu’elle entretint son linge lorsqu’il était jeune caporal, pour preuve cette reconnaissance de dette signée du jeune Buonaparte !
Pendant ce temps, le comte de Neipperg, est surpris au moment il où s’apprête à pénétrer dans les appartements de l’impératrice Marie-Louise. Il est arrêté. Napoléon ordonne son exécution qui doit être menée par Lefevbre. La maréchale elle, ne croit pas à la trahison de Neipperg, dont elle a sauvé la vie, en 1792, lors de la prise des Tuileries. Elle le fait évader. Après plusieurs quiproquos, l’innocence de ce dernier éclate, et les Lefebvre retrouvent la faveur impériale.
Le public est sous le charme de la gouaille de cette blanchisseuse, maréchale parvenue qui, le verbe haut, s’oppose et s’impose à l’Empereur, rabat le caquet de ses impériales sœurs et ne tient aucunement compte des convenances de la cour.
1Réjane : Gabrielle Charlotte Réju est née le 5 juin 1856 dans le quartier de la Porte-Saint-Martin, à Paris, entrée au Conservatoire d’Art Dramatique à 15 ans, elle y remporte le second prix d’interprétation et intègre la troupe du théâtre du Vaudeville. Elle prend alors le nom de Réjane.
2Catherine Hubscher : née dans le Bas-Rhin, à Altenbach, en 1753, elle est d’abord cantinière, puis blanchisseuse. Elle épouse le sergent François Lefebvre en 1783. Lorsque son époux est fait maréchal d’Empire et duc de Dantzig, en 1804, elle intègre la cour impériale, où elle se fait remarquer par son franc-parler et ses manières populaires, bien que jamais surnommée « madame Sans-gêne ». Tout au long de sa vie, elle s’attacha à ne jamais oublier d’où elle venait, et s’attacha à être avec son personnel et les plus humbles comme elle était avec les plus hauts.
Le succès de la pièce de théâtre du Victorien Sardou et Émile Moreau ne se dément pas et les représentations s’enchainent. La grande Réjane triomphe sur les planches dans le rôle titre. Peintres et sculpteurs s’emparent d’un sujetdont la notoriété à le vent en poupe : Madame Sans Gêne. Ainsi le peintre Georges Caïn (1853-1919) présente t-il au Salon des Artistes français de 1894 une toile décrivant « Victorien Sardou dirigeant une des répétitions générales de Madame Sans Gêne ».
Georges Van der Straeten (1856-1926), dans un style très proche de celui de Pierre Etienne Daniel Campagne propose également au Salon des Artistes français de 1894 une impertinente Madame Sans-Gêne, sous le titre de « Sous l’Empire ».
Quelques années plus tard, l’engouement pour la pièce n’est toujours pas retombé, et c’est madame Achille Valérie Fould, dite Achille-Fould, qui offre, au Salon des Artistes français de 1911, une charmante toile représentant Madame Sans-Gêne et son Lefevbre, dans le Premier Acte de la comédie.
© Copyright textes et photos : Les Trésors de Gamaliel