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Sculpteur
Augustin GARRY, 1847 - ?
Époque
circa 1893 et 1898
École
École française de Sculpture
Dimensions
Hauteur : 33 cm
Terrasse : 11 X 12 cm
Poids : 1438 gr.
Signature
Signé sur le côté droit de la terrasse
Cachet des Susse Frères éditeurs
Titré sur la face avant de la terrasse
Matériau
Épreuve en terre cuite.
GTGSVIEUXCRU
Augustin Marie Joseph (Augustin était son nom usuel) naquit par un frileux mercredi 20 janvier de l’année 1847 dans la petite bourgade d’Avesnières, aux portes de Laval, sur la rive droite de la Mayenne, l’année où le pont qui reliait les deux rives de la Mayenne depuis seulement 1839 (auparavant, il y avait un bac) s’effondra* .
Le père de notre sculpteur, Pierre était né le 26 septembre 1817 à Montjean (Mayenne). Il était ouvrier au moment de son mariage; et ni lui ni sa jeune épouse ne surent signer leur acte de mariage. Le propre père de Pierre, Jean (vous vous y retrouvez ?!), né sous l’Ancien Régime** était laboureur. En ces temps-là, le cultivateur et le laboureur avaient à peu près les mêmes tâches agricoles, à la différence que le laboureur possédait son propre outillage, ses propres bêtes et ses propres terres***. Jean Garry possédait donc un peu de bien, à défaut de savoir écrire et lire. Il cultivait ses terres en sa ferme de La Michardais, dans la commune de Saint Pierre-la-Cour, à mi chemin entre Laval et Vitré.
Pierre s’installa à Saint-Berthevin où il épousait, sitôt les moissons achevées, le 26 juillet 1842, Anne Astasie Bondu, une jeune journalière née au Mans le 15 avril 1819. elle était fille naturelle de père et mère inconnus, ce qui n’était pas une situation si rare que cela dans la première moitié du 19ème siècle.
Si le grand-père de notre artiste avait été laboureur, son père lui, étant sans bien et de condition plus frustre. Son acte de mariage, ainsi que l’acte de naissance de son fils le disent ouvrier. Travaillait-il aux carrières de marbre de rose (celui-là même qui pare la Chapelle de la Sorbonne) ? S’employait-il dans l’un des 9 moulins que le Vicoin actionnait à Saint-Berthevin ? Participait-il durement à l’exploitation de la chaux (la petite bourgade dénombrant alors 8 fours à chaux)… ? Tant de questions qui restent sans réponse. Toujours est-il que Pierre Garry ne resta pas longtemps à Saint-Berthevin puisque 5 ans plus tard, au moment de la naissance de son fils Augustin, il habitait, avec son épouse, Avesnières, aux portes de Laval.
Je vous disais que la vie d’Augustin GARRY était pleine de mystères, et voilà que je viens de vous élucider le mystère de ses origines, souvent le plus difficile à mettre au jour ! Rassurez-vous, si je puis dire, les mystères de sa vie désormais s’enchaînent.
Quelle éducation lui fut transmise ? Quelle instruction reçut-il ?
Nous retrouvons Augustin Garry des années plus tard, à Paris. Il y expose au Palais de l’Industrie, sous le numéro 2127, le buste en plâtre de M. Schmiler. Dans le catalogue officiel du Salon organisé par la Société des Artistes Français, on peut lire à la page 269 : GARRY (Augustin), né à Laval (Mayenne), élève de M. Ledru. À Artannes (Indre-et-Loire).
Aussitôt se posent 4 questions !
Comment de Mayenne vint-il à Artannes, tout petit d'Indre-et-Loire sans attrait majeur ?
Que fit donc Augustin Garry entre 1847 et 1893 ?
Qui est M. Schmiler, le sujet du buste exposé ?
Mais surtout qui est ce M. Ledru dont il se déclarait l’élève ?
Artannes, petit bourg rural de 332 habitants***** sur les bords de l'Indre hébergeait dont notre sculpteur, au numéro 35 de la rue principale. Que vint-il y faire ? Il était alors marié à Julie Thion, et accueillait dans son foyer la mère de cette dernière, Anne Bailby. Étrangement, il se disait rentier. La sculpture n’était-elle donc pas sa profession, juste un loisir éclairé ? Comment donc avait-il fait fortune pour qu’il puisse vivre de ses rentes, le fils d'ouvrier mayennais, et faire vivre son épouse et la mère de cette dernière ? À moins justement que la fortune ne lui soit venue deson épouse ?
Les questions se bousculent, mais les réponses restent rares et le mystère s'épaissit !
Auguste Garry se revendiquait de l’enseignement de M. Ledru. Évidemment, il eut été trop simple qu'il n'existât qu'un seul sculpteur du nom de Ledru ! Auguste Isidore Ledru, né à Reims le 24 mars 1837 et mort à Auvers-sur-Oise à quelques jours de la Noël 1918******, avait été professeur à l'École des Arts décoratifs de Paris, tenait atelier avenue de Ségur. Auguste Ledru était fils du premier*******. Il avait débuté au Salon de 1883, et accumula médailles et mention au cours des années suivantes. Un rapide calcul indiquerait que le père serait plus apte à avoir été le maitre d’Augustin Garry, or le Livret du Salon de 1893 nous offre gracieusement un renseignement inestimable : il indique que M. Ledru fils fut le maître de notre sculpteur !
Comment les deux sculpteurs se rencontrèrent-ils ? Comment le plus jeune (il avait 20 ans de moins !) accepta-t-il de transmettre ses techniques au plus ancien ? Quelle frustration de ne pouvoir répondre à ces questions !
Le livret du salon de 1897 notifiait qu’Augustin Garry était désormais sociétaire des Artistes français. En réalité, il était sociétaire dès 1894, inscrit sous le numéro 840. Ce qui est bien rapide, car en général, ce statut de sociétaire était réservé à des artistes très impliqués dans leur œuvre et leur carrière. De plus, pour devenir membre de la Société des Artistes Français, il fallait avoir exposé au minimum deux fois au Salon avant de pouvoir constituer un dossier devait recevoir l'agrément d'un jury composés des artistes les plus récompensés du moments… Certes, notre sculpteur avait exposé en 1893, mais rien avant. Il exposait à nouveau en 1897 et 1899, puis rien pendant les huit années suivantes. Il reprenait ses envois en 1907, et jusqu'en 1914.
Quelle étonnante carrière !
Mais je ne saurais achever cette rocambolesque biographie sans une dernière information ... fort .... singulière.
Alors que manifestement, Augustin Garry n’avait gardé aucun contact avec ses parents, puisque le jour de son second mariage, il avait été incapable de dire quand étaient morts ses parents et où, il était resté proche de son frère aîné, Pierre********. Celui-ci exerçait la profession de maçon, et demeurait avec son épouse, Jeanne Bourcier, au numéro 55 de la rue du Bel Air à Laval. Comment les choses se firent ? Mystère supplémentaire ! Toujours est-il que par la grâce d’un décret présidentiel l’y autorisant, notre Augustin Garry, alors âgé de 58 ans, épousa sa nièce, Berthe GARRY, alors âgée de 33 ans, à Maisons-Laffitte le 25 février 1905. Si l’on en croit les témoins de ce mariage, Augustin Garry ne fréquentait guère le milieu artistique ou à tout le moins n’y avait aucune amitié sérieuse : ses quatre témoins étaient un parfumeur, un représentant en parfumerie, un entrepreneur en menuiserie, et un employé. Quelles furent les raisons de ce mariage hors normes ? Nous ne le saurons jamais, tout comme nous continuerons d’ignorer pourquoi Augustin Garry n’exploita pas davantage son talent de sculpteur…
Alors qu’aux salons, il avait présenté des médailles portraits et des bustes portraits, ce qui semblait être assez de la sculpture alimentaire, en quelque sorte (exposer des bustes aux salons permettait de faire admirer ses talents de portraitiste, et ainsi de décrocher des commandes…), Augustin Garry nous livre avec sa sculpture Vieux Cru, un petit pan de son enfance et de ses origines agricoles. Admirons l'excellence presque surprenante du travail sur le jeu des muscles et tendons des bras. Chaussé de sabots de bois, les manches de la chemise roulées haut sur les avant-bras révélant qu’un bel effort venait de s’achever, un homme aux traits harmonieusement burinés débouche une bouteille, sans doute une belle cochonnaille et une miche dorée trainent-il dans un panier sous un arbre pour compléter la pause bien méritée.
* Reconstruit l’année suivante, le pont s’effondra à nouveau en 1872. Il résiste jusqu’à ce qu'en 1944, les Allemands le dynamitent. Le pont actuel résiste vaillamment depuis 1946 !
** en 1774
*** Au cours du 19ème siècle, les deux termes tendèrent à se confondre, et celui de laboureur finit pas disparaître.
**** La mère d'Augustin Garray, Anne Astasie Goubu lle était employée, pour 5 à 6 sous à la journée, à des tâches aussi variables que curer les poulaillers, baratter le beurre, sarcler le potager ou récolter les pommes.
***** en 1894
******15 décembre
*******Né à Paris en 1860, il mourait chez lui, au 25 de la rue Royale, à l'apogée de son art, à l'âge de 42 ans.
******** né le 17 février 1844 à Avesnières.
© Copyright textes et photos : Les Trésors de Gamaliel