Une enfance Lyonnaise
Le 6 septembre 1765, à Lyon, Marie Blanc, servante, et Henry Capet, domestique, donnent naissance à une petite fille qu'ils prénomment Marie-Gabrielle.
Portrait de Marie-Gabrielle Capet vers 1786
François-André VINCENT
Pierre noire, sanguine, rehauts de blancs
Signé et dédicacé "à Mlle Capet 1815" - 43,5X33,4 à vue
Petit Palais - Paris
Comment est-elle éduquée ?
Comment développe-t-elle son talent artistique ?
Comment en vient-elle à se rendre à Paris ?
Par quelle entremise rencontra-t-elle Adélaïde Labille-Guiard et entra-t-elle dans son atelier ?
Autant de questions sans réponses.
Mais une chose est sûre, c’est que Marie-Gabrielle présente, pour la toute première fois,à l'Exposition de la Jeunesse, le 9 juin 1781, un dessin aux trois crayons.
L'Exposition de la Jeunesse
Depuis 1722, tous les ans, en plein air, le jour de la Fête-Dieu, ou à son octave s’il pleuvait (alors jour de la Petite Fête-Dieu) se tenait une Exposition de la Jeunesse.
De 6 heures du matin jusqu’à midi, sur la place Dauphine et le Pont-Neuf, les jeunes artistes (qu’ils soient hommes ou femmes), présentent leurs œuvres à un large public, tout en n’échappant pas à l’œil des critiques d’art ni à celui d’éventuels mécènes. Pendant les 66 ans qu’elle se déroula, elle obtint un grand succès.
Autoportrait - 1790
Marie-Gabrielle Capet
Fusain et sanguine avec rehauts de craie blanche sur papier vergé - 34 X 29,3 cm
Fogg Art Museum, The Jeffrey E. Horovitz Collection, Harvard University, Cambridge, Massachussets, États-Unis
Une élève d'Adélaïde Labille-Guiard
Marie-Gabrielle Capet entre dans l’atelier d’Adélaïde Labille-Guiard sans doute en 1778, peut-être l’année d’avant, ou celle d’après.
Par quelle entremise ?
Sur quelle recommandation ?
Beaucoup de questions sans réponses, concernant la vie de Marie-Gabrielle. Mais finalement l’important n’est pas là...
Adélaïde accueille la jeune fille dans son atelier, lui apprend à développer ses talents, et l’héberge même chez elle, au 139 de la rue Richelieu.
De ce jour, Marie-Gabrielle ne quitte plus le foyer de sa mentor.
Mais qui est donc Adélaïde Labille-Guiard ?
Adélaïde naît le 11 avril 1749 à Paris, dans le foyer de Claude-Edmé LABILLE et de Marie-Anne SAINT-MARTIN. Le père tient un commerce de mercerie « La Toilette », près du Palais Royal.
Alors qu’elle n’est encore qu’adolescente, elle entre dans l’atelier du portraitiste et miniaturiste genevois François-Elie VINCENT (1708-1790), puis en 1769 à l’Académie Saint-Luc, l’année même de son mariage avec Nicolas GUIARD.
En 1774, ce sont les cours de Maurice-Quentin de LA TOUR (1704-1788) qu’elle suit. Trois ans plus tard, François-André VINCENT (1746-1816), le fils de son premier maître lui enseigne la technique de la peinture à l’huile.
1779 est l’année de sa séparation d’avec son mari, Nicolas Guiard, dont elle finira par divorcer quelques années plus tard. Toutefois, Adélaïde conserve le nom de ce dernier, étant désormais connue sous le patronyme de Labille-Guiard.
Le 31 mai 1783, elle est admise à l’Académie Royale de Peinture et de Sculpture, et reçoit, le 10 août 1787, le brevet de « Peintre de Mesdames ».
Les années 1789 à 1791 sont très périlleuses pour Adélaïde Labille-Guiard qui négocie néanmoins le tournant révolutionnaire avec finesse. Elle n’hésite pas à afficher de nouvelles idées politiques, fait une donation patriotique à l’Assemblée Nationale, et peint les portraits de 14 députés, qu’elle expose d’ailleurs au Salon de 1791. La Terreur contraint Adélaïde, et François-André Vincent à se retirer dans la maison que le couple avait acquise à Pontault-en-Brie. Rentrée à Paris, Adélaïde s’installe, avec Marie-Gabrielle Capet, dans un logement d’artiste au Louvre.
En juin 1800, après vingt ans de vie commune, Adélaïde épouse François-André Vincent, et s’installe, avec Marie-Gabrielle Capet, dans le même appartement jusqu’en mars 1802 où par décret ministériel, les logements du Louvre doivent être libérés. Ils emménagent alors de l’autre côté de la Seine, au Pavillon du Couchant, au collège des Quatre-Nations.
Elle ne profite guère de ce dernier logement. Après deux mois d'une maladie foudroyante, elle est rend son dernier souffle le 8 avril 1803. Elle n’a que 53 ans.
L’atelier de Madame Vincent 1808
Détail – Adélaïde Labille-Guiard et François-André Vincent
Marie-Gabrielle CAPET
Huile sur toile - 83 cm x 69 cm
Nouvelle Pinacothèque de Munich
Le double rôle de Marie-Gabrielle
La carrière d’Adélaïde prend réellement son plein essor après sa réception à l’Académie Royale de Peinture et de Sculpture le 30 mai 1783. Son atelier est florissant, les commandes affluent. Marie-Gabrielle partage les talents d’enseignante d’Adélaïde avec 9 autres jeunes filles dont Marie-Victoire d’Avril (1755-1820), Madeleine Frémy (circa 1760-1788), Marie-Thérèse de Noireterre (1760-1823), Jeanne Dabos née Bernard (1763-1842), Marie-Marguerite Carraux de Rosemond (1765-1788), et bénéficie de la clientèle d’Adélaïde. Si elle assiste Adélaïde, elle reçoit aussi ses propres commandes et son nom, peut à peu est reconnu en qualité de portraitiste.
Avec ses condisciples, Marie-Gabrielle présente ses toiles chaque année aux Expositions de la Jeunesse jusqu’en 1785. Cette année-là, c’est au Salon de la Correspondance que Marie-Gabrielle expose. Les critiques apprécient ses qualités d’aquarelliste et de pastelliste, mais aussi de miniaturiste. En effet, Marie-Gabrielle laissant à son mentor l’exécution des toiles grand format, s’attachait aux portraits sur ivoire.
Julie Madeleine Sophie Forget, baronne Dannery (1772-1851)
Tenant son fils jean Germain Samuel Adam dans ses bras
Marie-Gabrielle Capet
1799 - Aquarelle et gouache sur ivoire - 13,5 X 9,5 cm
Collection particulière
Colonel Kristian Georg von Schantz (1731-1814)
Marie-Gabrielle Capet
Aquarelle et gouache sur ivoire - Ø 7,1 cm à vue
Nationalmuseum - Stockholm
Le Salon de la Correspondance
Crée en 1779 par Mammès Claude Catherine Pahin-Champlain de la Blancherie, le Salon de la Correspondance ouvre en 1781. À la fois cercle littéraire proposant des conférences littéraires et scientifiques, ou des lectures publiques, il se tenait à l’hôtel de Vieuville, rue saint André des Arts.
Des expositions de tableaux présentait des tableaux d’artistes qui n’étaient pas admis à l’Académie Royale.
Le Salon de la Correspondance fonctionna une dizaine d’années, mais sans le soutien de l’État, les difficultés s’accumulaient et il ferma ses portes définitivement en 1788.
L’atelier de Madame Vincent
Marie-Gabrielle Capet
Présenté au salon de 1808
Huile sur toile - 83 cm x 69 cm
Nouvelle Pinacothèque de Munich
Il s’agit de l’atelier d’Adélaïde Labille-Guiard. La célèbre portraitiste est représentée devant le chevalet, pinceau à la main. Marie-Gabrielle Capet est assise à sa gauche, préparant ses couleurs, son marin en habit d’académicien, est debout derrière elle. Il se penche sur son chevalet, la conseillant. Elle exécute le portrait du peintre, sénateur et comte d’Empire Joseph-Marie Vien (1716-1809), en habit de cour, entouré des membres de sa famille et de quelques-uns de ses élèves. Ce dernier avait été le maître de François-André Vincent.
Marie-Gabrielle réalise ce tableau alors qu’Adélaïde est morte en 1803. Il s’agit pour elle d’un hommage à son maître et mentor.
Dans la tourmente révolutionnaire
Aux côtés d’Adélaïde, Marie-Gabrielle s’adapte du mieux qu’elle peut, développant une nouvelle clientèle au sein de la classe politique qui émergeait de la Révolution. Cependant, le climat de suspicion monarchique qui règne à Paris tout au long des années 1792-94 et qui multiplie les exécutions sommaires, 2 918 recensées (la propre sœur de François-André Vincent fait d’ailleurs partie du lot), ajouté au patronyme de Marie-Gabrielle qui apparaît comme plus que suspect, Adélaïde Labille-Guiard et François-André Vincent s’installent, avec Marie-Gabrielle et Marie-Victoire d’Avril, dans un domaine de Pontault-en-Brie.
Anne-Félicité Grésille, dame de Longrois (1763-1826) - 1785
Épouse de M. de Longrois, concierge-intendant du château de Fontainebleau
Marie-Gabrielle Capet
En buste, tête de face, une gaze sur la tête, cheveux poudrés, corsage de satin bleu, fleurs au corsage
Pastel sur papier marouflé - 73.1 × 59.4 cm
Palais de Versailles
Jeune garçon en habit gris violacé et gilet rayé
Assis de profil à une table, et lisant.
Marie-Gabrielle Capet
Aquarelle et gouache sur ivoire. Ø 7,4 cm
Signé et daté (An XII)
Ce portrait avait été à tort identifié comme étant le portrait de Louis XVII.
Collection particulière
Elisabeth de France
Marie-Gabrielle Capet
Vêtue d'un costume blanc, ceinture lilas, coiffe blanche posée sur des cheveux à reflets roux
Miniature ronde sur ivoire, aquarelle et gouache - Ø 6,4 cm dans cadre d’or
Collection particulière
Elisabeth de France circa 1785
Marie-Gabrielle Capet
dans un cadre en argent et diamants
Ø 6 X 5 cm miniature sur ivoire, aquarelle et gouache
Museo civico d’Arte Antica, Palazzo Madam, Turin
Homme vêtu d'un gilet rouge et d'une veste violette
Marie-Gabrielle Capet
Circa 1796 - aquarelle et gouache sur ivoire - Ø 6,8 cm
Collection particulière
Les années de maturité
L’éloignement de la capitale prend fin en 1795, Marie-Gabrielle et Adélaïde sont logées au palais du Louvre, dans les logements d’artistes. Le climat artistique de Paris est entièrement chamboulé, et leur clientèle est désormais celles d’avocats, de savants, d’artistes, de comédiens.
La mort d’Adélaïde Labille-Guiard laisse Marie-Gabrielle comme orpheline, et c’est désormais du mari de celle-ci, François-André Vincent dont elle s’occupe filialement. Celui-ci l’incite à pratiquer davantage la peinture à l’huile, ce qui lui convient très bien.
La solitude inapprivoisée
Dans la nuit du 3 au 4 août 1816, François-André Vincent rend son dernier souffle. Marie-Gabrielle s’installe au 2ème étage du 16 de la rue de l’Abbaye, dans le Xème arrondissement.
Elle qui n’a jamais connu la solitude en fait désormais l’expérience. Son ancienne condisciple Marie-Victoire d’Avril vient la visiter de temps à autre, mais Marie-Gabrielle, qui ne peint plus, s’affaiblit peu à peu et s’éteint âgée d’à peine de 57 ans, le 1er novembre 1818.
Jeune homme en redingote bleue à rayures et jabot - Circa 1790-95
Marie-Gabrielle Capet
Miniature sur ivoire, aquarelle et gouache, Ø 6,7 cm
Boîte en laque et écaille de tortue, monture en or, verre pour la boîte 8 X 3,1 cm
Collection particulière
Stéphanie Félicité du Crest de St-Aubin 1746-1831, comtesse de Genlis, marquise de Sillery
Marie-Gabrielle Capet
Aquarelle gouachée sur ivoire signée datée An VI (1798)
Ø 7,1 cm à vue
Nationalmuseum - Stockholm
Portrait de Mlle ** - 1817
Marie-Gabrielle Capet
Aquarelle et gouache sur ivoire - Ø 5,8 cm
Collection particulière
Jean-Pierre DEMETZ, avocat
Marie-Gabrielle Capet
Pastel, 69,2X54,6 cm
Signé daté (An 9) 1800
Collection particulière
D'une miniature à l'autre
C’est le suédois Pierre-Adolphe HALL (1739-1793), qui introduit l’art de la miniature sur ivoire dans la capitale française en 1766. Il avait compris que cette matière permettait un rendu de la peau d’un effet plus réaliste qu’avec tout autre support.
Marie-Gabrielle utilisait des feuilles d’ivoire d’environ un ½ cm comme support. Avant de peindre, elle ponçait la feuille d’ivoire pour en éliminer toutes les imperfections. Toutefois, une surface légèrement rugueuse offrait une meilleure adhésion des couleurs.
RECENSEMENT ACTUEL DES ŒUVRES DE MARIE-GABRIELLE
- 30 huiles
- 35 pastels
- 85 miniatures
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