Gentleman sympathique et bienveillant, à l’élégance racée mais néanmoins discrète, cavalier accompli et veneur passionné, Gaston Patas d’Illiers était né un 26 juin 1876 à Olivet, près d’Orléans, dans une famille dont la noblesse remonte au 11ème siècle. Il vécut toute sa vie au calme et dans la discrétion, partagé entre sa résidence d’Orléans et le domaine familial de la Fontaine, situé sur les bords du Loiret. Ne recherchant ni la gloire ni la célébrité, il mena, entouré des cinq enfants qu’il eut de sa femme, Madeleine de Marin de Montmarin (1877-1964) épousée en 1899, la vie paisible des hobereaux de province, tout en créant une œuvre maîtresse qui a, aujourd’hui encore, de nombreux amateurs.
Il découvrit, lors de son adolescence, le cheval et les chasse à courre dans la forêt domaniale d’Orléans ou en Sologne voisine, et le moulage à la cire et la sculpture. Formé par le sculpteur catalan Gustave OBIOLS (1858 - circa 1930), le comte Geoffroy de RUILLÉ (1842 - 1922) , sculpteur animalier, et le peintre animalier Georges BUSSON (1859 - 1933) Gaston d’Illiers s’initia aux techniques qui changent la cire en une statue de bronze. Sa passion pour l’équitation et la vénerie le poussèrent dans le domaine de la sculpture animalière, et plus particulièrement dans la représentation du monde équestre. Dès 1899, le Salon parisien des Artistes français exposait ses œuvres. Sculpteur passionné et prolifique, ce fut quelques 102 œuvres qu’il y présenta entre 1899 et 1930. Il exposa également dans de nombreux autres salons, comme la Société des Artistes Animaliers, des expositions canines et hippiques.
Cavalier chevronné, dresseur équestre, veneur, il prenait un plaisir infini à sculpter les chevaux, ainsi que les chiens de meutes. Il sculptait les siens (Miss, Youyou, Whip, Violette, Sweet Heart, Képi, Colibri, Emeralda …), ceux de sa famille ou ses amis (Protocole, Nonciature, Jack, Sydney, Moonshine, Le Bourgeois, Sous-Off, War Claim…) mais également les pur-sang vus à l’hippodrome (Idylle, Bulletin Rose, Rosetta XIV…), ou les chevaux anonymes, à l’ouvrage dans les champs, au repos dans un pré… tels son Boulonnais au trot de 1896, sa Charrue (1899), son groupe Cheval et âne de Halage de 1901, ses Chevaux à la Herse de 1906, son Fardier (1911) ou encore son Étalon Boulonnais de 1921. Très souvent jury de concours agricoles locaux, Gaston d’Illiers aimait à sculpter ces solides chevaux rustiques, dont la puissante musculature évoquait la peine et le dur labeur.
Il ne dédaignait pas non plus, parfois, donner à ses chevaux des postures peu conventionnelles, comme son Arabe Cabré (1897), son Cheval sautant (1898), son Mouvement de Gaieté (1903), son groupe La Haie, son Idylle sautant de 1923 tous les deux, ou encore son Poney sautant (1924) jetant ses postérieurs en l’air dans une torsion vers la gauche spectaculaire.
Son frère, Louis, diplomate en poste en Algérie, l’y recevait à deux reprises, une fois en 1899 et une autre fois en 1910, nourrissant la créativité du jeune sculpteur.
La Grande Guerre n’épargna pas notre sculpteur et sa famille. Bien que réformé en raison de sa mauvaise santé, il s'engage néanmoins et est incorporé au 8ème Régiment de Chasseurs à Cheval, en garnison à Orléans depuis 1909, il prend part à l’offensive de Champagne (25 septembre 1915) avant de tomber si gravement malade qu’il doit être évacué.
Remis, il incorpore les écuries de dépôt d’Orléans où il se consacre au dressage des chevaux de guerre. Démobilisé en 1918, il retrouve son château de La Fontaine à Olivet, puis le Moulin de Saint-Samson, tout en continuant de fréquenter la rue Chanzy, à Orléans, où se tient son atelier. Il produit cinq sculptures inspirées de cette guerre, : Dans la boue de la Somme (1916), l’Estafette à Cheval, l’Attelage d’Artillerie (en 1919), son bas-relief du Monument aux Morts d’Olivet (1920) et son projet de Monument aux Morts, Aux Animaux de la Guerre font mémoire de toutes ces vies perdues lors de la Grande Guerre.
Dans les premiers jours de novembre 1932, Gaston d’Illiers prenait froid lors de l’un de ses déplacements entre Orléans et Olivet, et décédait quelques jours plus tard (le 13) d’une mauvaise fièvre. Il n’avait que 56 ans. Mais la vérité est sans doute qu’il mourrait du trop grand chagrin d’avoir perdu trois ans plus tôt son troisième enfant, sa fille Marie-Antoinette, âgée de 26 ans, dans un tragique accident d’automobile.
Il laissa, de sa carrière de sculpteur qui s’étala sur une trentaine d’années, quelques 204 œuvres, de petites tailles (sauf exception, toute en dessous de 50 cm de haut). Sculptées d’abord en cire ou en plâtre, ses œuvres (pas toutes) étaient ensuite éditées en bronze. Gaston d’Illiers vendait ses œuvres, en général directement à des particuliers, mais aussi à des clubs hippiques pour servir de prix.
Aujourd’hui encore quelques-unes des sculptures de Gaston d’Illiers sont éditées par des fondeurs contemporains, telle la Fonderie Lauragaise, sous le contrôle de l’Association Gaston d’Illiers sculpteur, qui détient les modèles.
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