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Époque
1920 pour le chef modèle
Provenance
France
École
École française de sculpture
Dimensions
Hauteur : 42 cm
Profondeur : 16 cm
Largeur : 23 cm
Diamètre : 8 cm
Signature : Sur le côté de la terrasse : Ch. Richefeu
Cachet du fondeur sur la base arrière de la terrasse,
Susse Frères Editeurs.
Matériau
Épreuve en bronze à patine brune,
reposant sur un socle de forme ronde.
Composé de plusieurs pièces.
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Chaque artiste à son domaine de prédilection, les thèmes particuliers qu'il aime à traiter. Charles Edouard Richefeu ne fait pas exception à la règle.
Lui, c'est la période napoléonienne.
Il sculpte avec grand bonheur des portraits, des figures de soldats du Premier Empire, aux traits marqués et expressifs, ainsi des groupes militaires aux beaux accents de vérité, aux mouvements vivants, aux lignes à la fois nettes, vigoureuses et souples.
Comme l’écrit le critique Raymond Sélig dans son article sur le Salon des Artistes Français, paru dans la Revue du Vrai et du Beau (10 octobre 1924) : « Son talent sincère d’une si frémissante sensibilité, crée des œuvres d’une émotion très communicative. (…). Serviteur passionné de son art, technicien consommé, artiste sensible, original et vrai, Charles Richefeu est un de nos sculpteurs les plus remarquables et les plus intéressants. »
(…)
Derrière un mamelon la garde était massée.
La garde, espoir suprême et suprême pensée !
« Allons ! faites donner la garde ! » cria-t-il.
Et, lanciers, grenadiers aux guêtres de coutil,
Dragons que Rome eût pris pour des légionnaires,
Cuirassiers, canonniers qui traînaient des tonnerres,
Portant le noir colback ou le casque poli,
Tous, ceux de Friedland et ceux de Rivoli,
Comprenant qu’ils allaient mourir dans cette fête,
Saluèrent leur dieu, debout dans la tempête.
Leur bouche, d’un seul cri, dit : vive l’empereur !
Puis, à pas lents, musique en tête, sans fureur,
Tranquille, souriant à la mitraille anglaise,
La garde impériale entra dans la fournaise.
Hélas ! Napoléon, sur sa garde penché,
Regardait, et, sitôt qu’ils avaient débouché
Sous les sombres canons crachant des jets de soufre,
Voyait, l’un après l’autre, en cet horrible gouffre,
Fondre ces régiments de granit et d’acier
Comme fond une cire au souffle d’un brasier.
(…)
Les Châtiments, L’Expiation XIII, II
Victor Hugo, 1853
Ce Grognard de la Garde Impériale acclamant son Empereur est en fait la reprise de l’une des figures d’un groupe, sculpté par Charles Richefeu.
Ce groupe représente la charge du Premier Régiment de Grenadiers de la Garde Impériale, le plus illustre de tous les régiments de Grenadiers. L'artiste l'avait réalisé en 1913. Il est conservée au Musée de l’Armée, salle Turenne.
L'année suivante, le sculpteur extrait de ce groupe un personnage, le Grognard qui, les bras levé, acclame son Empereur, et baptise sa nouvelle composition Vive l’Empereur.
Il remanie sa posture, et en fait fondre une statue monumentale de 3,3 mètres de haut. Elle remporte une médaille et lui vaut d’être achetée par l’État. L’on peut la voir dans une coursive donnant sur la cour d’honneur du musée des Invalides, à Paris.
Deux autres groupes de Charles Richefeu, La Charge de Dragons du Premier Empire (1909) et les Grenadiers de la Garde (1910) sont également acquis par le Musée de la Guerre.
À partir de 1920, il édite son Vive l'Empereur en l'ayant réduit. Il remporte un succès d’autant plus vif que les éditions ne sont pas nombreuses, ce qui contribue au caractère exceptionnel de cette statue.
L’une d’entre elle, une édition de 26 centimètres est également visible, depuis 1951, au Maryhill Museum of Art, Goldendale, Washington).
Comme tout soldat de la Vieille Garde, notre Grenadier porte la moustache en « crosse de pistolet », des favoris de chaque côté du visage, et les cheveux longs noués en tresse sur la nuque, poudrées de blanc et attachées par un cordonnet terminé d’une grenade d’argent ou de l’Aigle impérial.
Le poudrage des cheveux en blanc est d’ailleurs la raison qui a valu à cette Garde le nom de Vieille Garde. Ce n’est pas le cas de notre Grenadier, mais presque tous les soldats de la Vieille Garde portent à chaque oreille, un anneau aussi grand qu’un écu.
En pleine extension, quasiment sur la pointe des pieds, les bras en l’air.
L’un porte haut son fusil emmanché de sa baïonnette.
L'autre tient à bout de bras sa Ruche à Miel (en langage de Grenardier de la Vieille Garde, son bonnet d’ourson).
Ne l'entendons-nous pas, notre Grognard, hurler à plein poumons avec coeur et conviction, d’une voix rendue rauque par le Brûle-gueule (entendre la pipe ... en langage de Grognard !) tétouillée à chaque bivouac, et peut-être aussi par quelque alcool bien fort
« Vive l’Empereur !!! »
pour célébrer la victoire ou effrayer l'ennemi avant la charge.
Napoléon Bonaparte crée la Garde Impériale le 28 floréal an XII, dans notre calendrier grégorien, le 18 mai 1804.
Il l’officialise par décret le 29 juillet 1804.
Pourquoi une telle création ? L'Empereur voulait autour de lui un corps d’armée d’élite, chargé de sa défense personnelle, directement sous ses ordres, dont les hommes seraient recrutés parmi les plus anciens et les meilleurs de ses soldats.
Composée de 9798 hommes au départ, ses effectifs augmentent rapidement pour atteindre, en 1814, 112 482 hommes.
À mesure de sa croissance, la Garde est divisée en Jeune, Moyenne et Vieille Garde. Chaque Garde comprend des unités de cavalerie, d’artillerie et d’infanterie, dont les valeureux Grenadiers, illustrés ici par Charles Richefeu, la Vieille Garde concentrant l’élite de l’armée.
Rapidement, la Garde devient non plus seulement protectrice, mais combattante et modèle du reste de l’armée.
Seule la propre valeur du soldat lui permet d’accéder à la Garde Impériale.
Pour entrer dans le régiment d’élite du Premier Grenadiers à pieds de la Garde Impériale,
il ne fallait pas moins de dix ans de service (douze ans pour les officiers),
avoir toujours eu un comportement irréprochable aux cours de combats,
savoir lire et écrire,
être doté d’une excellente moralité
et… une taille minimum plus de cinq pieds cinq pouces (un mètre soixante-seize).
Mais si elle est fidèle à son Empereur, la Garde grogne. Grogne avez-vous dit ?
En ces jours de novembre 1806- janvier 1807, dans les grandes plaines polonaises, engluées jusqu'aux épaules dans des chemins qui ne sont qu'un immonde magma boueux, la Garde peste et grogne. La pluie tombe et tombe encore. Les cantines ne servent plus qu'une soupe infâme et encore, une fois par jour.
Et oui, la Garde grogne, et grogne contre tout !
Contre le froid,
contre la pluie,
contre le gel,
contre la boue,
contre la faim,
contre les marches insensées,
contre la lourdeur de l’équipement...
Ils peuvent certes avoir raison, ces Grognards, de grogner !
En effet, si le règlement stipule que le soldat ne doit pas porter plus de quarante livres (vingt kilogrammes environ), dans la réalité, il est bien plus chargé, sans compter le poids du sabre, du fusil (long de un mètre cinquante-deux pour presque quatre kilos et demi).
Jamais en peine de sujets de mécontentement, le Grognard !
Parlons en d'ailleurs de ce fusil de 1777 : sa vitesse de tir est lente : de deux coups-minutes, est-ce donc possible ?!! Et son chargement ! Parlons-en de son chargement ! Si terriblement laborieux ! Et le canon, ne s’encrasse-t-il pas bien trop vite ? Est-ce possible ça, de devoir laver et sécher son fusil tous les cinquante à soixante coups ? Non mais vraiment !!
Et encore s'il n'y avait que ça ! Mais non ! Pour couronner le tout, une fois sur quinze tirs environ, le silex ne fonctionne pas. Et quand le silex ne fonctionne pas... savez vous ce qui se passe ?! RIEN !! Tout simplement, le coup ne part pas ! Guère pratique face à l’ennemi !
La Garde grogne et bougonne, mais continue d'avancer dans la pluie. Et Napoléon, qui chevauche à leurs côtés, les traite affectueusement de... « Grognards »…
© Copyright textes et photos : Les Trésors de Gamaliel